15 novembre 2021 – Visite d’Uzès des années 50 et 60

Un bon groupe de Zébriniens

Promenade insolite à travers la ville en compagnie d’un Uzétien pure souche, Jean-Gabriel Blanc, qui nous contera la vie quotidienne des années 50-60 d’avant les campagnes de restauration des quartiers anciens et le grand rush touristique d’aujourd’hui.

En parcourant les ruelles du centre et des bourgades il retracera un aspect disparu de la ville au temps de sa jeunesse : la configuration des quartiers, les magasins, les enseignes, les métiers, les personnages pittoresques, etc. sans oublier de nous pousser la porte de certains hôtels particuliers. Bref une visite guidée hors des sentiers battus et des circuits touristiques.

Rendez-vous : 14 h devant le monument aux morts de l’esplanade à Uzès. La promenade devrait durer 2h, 2h30.

 

Ça c'est bien passé

Jean-Gabriel Blanc

Les rayons du soleil du matin avaient fuit pour être remplacés par une bruine légère. Pourtant, un bon groupe (29) de Zébriniens s’était tout de même rassemblé à l’entrée d’Uzès, au bout de l’esplanade, au pied du Monument aux morts. Novembre, mois des commémorations et de la froidure était bien là, mais notre guide du jour nous attendait.

Jean-Gabriel Blanc

Uzétien de longue date et d’une famille d’Uzétiens, il a co-crée l’association La Sorève qui milite pour la protection du patrimoine et de l’environnement de l’Uzège et du Gard. Il a crée aussi le Comité de quartier des Bourgades et connait bien l’histoire de sa ville. Il ne va pas la présenter comme les guides conférenciers qu’il nous invite à suivre, mais comme un habitant qui a passé une bonne partie de son enfance à Uzès. Nous nous baladerons au fil de ses connaissances et de ses souvenirs.

Le parcours

Du Monument aux morts nous irons vers la Caisse d’Épargne, la Petite Bourgade, puis vers le Barry, nous passerons par la rue Paul Foussat, la place d’Austerlitz puis la rue Port Royal et la rue du Dr Blanchard pour bifurquer vers la rue Entre les Tours et la rue de l’Épée pour arriver à la place aux Herbes. Un parcours loin des grands monuments comme le Duché ou la Cathédrale mais un parcours personnel dans le vieil Uzès.

 

Le Monument aux morts de l’Esplanade

Il présente comme tous ceux de l’Uzège une liste impressionnante de 150 noms de jeunes morts à la guerre de 14. Il est surmonté d’un coq qui a eu la bougeotte. Orienté vers le Nord comme il se doit où se trouvait l’ennemi, il a du être déplacé. Il regarde maintenant vers l’Ouest pour éviter les problèmes de circulations lors des cérémonies commémoratives.

 

Sur l’Esplanade

L’Esplanade

L’Esplanade était autrefois fermée par deux octrois qui bloquaient l’accès à la ville. Transformés ensuite en poids public et en maison d’habitation, ils sont à présent détruits. Au-delà c’étaient les champs, les jardins, l’Avenue de la Gare était plantée de mûriers, il y avaient des près où coulait le Redounet et où paissaient des vaches. Mais oui, il n’y a pas si longtemps !

Sur l’avenue de la Libération qui borde l’Esplanade se trouve le Temple protestant qui occupe une partie de l’ancien couvent des Cordeliers. Ce qui a donné l’occasion à Jean-Gabriel de parler de l’aspect religieux de la ville et du clivage entre protestants et catholiques. La communauté protestante est encore très nombreuse alors qu’au 17e siècle elle était prépondérante. Après le Révocation de l’Édit de Nantes, de nombreux protestants sont partis pour les pays du Refuge emportant avec eux leurs connaissances et savoir faire, ce qui a ruiné la ville. Notre guide quand il était petit allait acheter son pain chez Madame Jonquet (protestante) et nulle part ailleurs, il en était de même pour les autres commerces pour les deux communautés. Cette prégnance religieuse très marquée reste encore dans les relations entre les gens et peut paraitre étonnante.

Devant la Caisse Epargne

Le boulevard des Alliés

Nous dirigeant vers les Bourgades nous sommes passés devant l’Ancienne Chapelle des sœurs régentes où se trouvait dans les années 50 le premier garage Citroën. Il fut remplacé par la Coupole d’or, lieu culturel privé dans les années 80. Nous observons au passage la porte Saint-Étienne, une des 4 portes de la ville médiévale, bien fermée le soir venu, ce qui explique la présence des Hostelleries comme celle du Merle, l’Hôtel Béchard… en dehors de l’enceinte de la ville.

De l’autre côté, entre les deux bourgades sur la Place Belle Croix trône la Caisse d’Épargne, véritable temple de l’Épargne, le bâtiment est cossu, colonnettes, chapiteaux, balcon, grand escalier et boiseries dans le hall d’entrée jusque dans les années 90.

 

Les Bourgades : Petite et Grande

Rue Grande Bourgade

La Grande était sur le chemin de Montpellier, axe de circulation important. C’était une rue peuplée d’artisans aux petites maisons populaires. Jean-Gabriel se souvient aimer faire du vélo dans cette rue où il fallait slalomer (pour ne pas glisser) entre les bouses des vaches qui allaient paître dans les prairies de Servezanne toutes seules.

La Petite était sur le chemin de Nîmes et devait se poursuivre jusqu’au Pont Romain vers Blauzac. Les maisons sont plus bourgeoises comme celle du n° 15 où nous avons pu entrer. La grande porte s’ouvre sur une cour pavée avec puits, belles voûtes et au fond un bel escalier aux balustres biaises.

 

Le Barry

Sur le Barry

Nous passons devant l’Église Saint-Étienne de style jésuite en observant la Maison Gide, celle de l’économiste Charles Gide théoricien du mouvement coopératif (oncle d’André, célèbre auteur de « Si le grain ne meurt », souvenirs d’enfance à Uzès).

En longeant l’église aux fines sculptures, nous atteignons le Barry ou barrière, le rempart, dernière trace de l’enceinte de la ville où nous circulons entre des pots de fleurs, au niveau des branches hautes des grands platanes. Cette ruelle surplombe des maisons nichées dans la muraille comme celle du tapissier Pasquier que nous saluons. Nous descendons l’escalier raide et vertigineux pour atteindre la rue Paul Foussat ancienne rue de la barrière sur le chemin de Beaucaire.

 

Rue Paul Foussat et Place d’Austerlitz

Devant lHôtel de Baudan

Nous observons l’Hôtel de Roche qui présente quatre culs-de-lampe, quatre personnages dont l’un porte un écu et l’autre un phylactère. Dans la cour, une tour à pans coupés avec escalier en vis. De l’autre côté de la rue, l’Hôtel de Baudan avec l’extraordinaire portail du 16e s. baroque qui a été restauré, ses décors géométriques ont été « massacrés ». Cette maison possède en son sous-sol des voûtes rares, dites syriennes.

Nous poursuivons jusqu’à la place d’Austerlitz ancienne place des irondes qui a été créée par la démolition de certains bâtiments, ce qui a permis à notre guide de nous rappeler qu’Uzès était une petite ville très resserrée aux rues étroites encombrées, aux nombreux arceaux ou passages voûtés aujourd’hui détruits comme ceux de la rue des « crotes » ou grottes (et non pas… !)

 

 

Rue Port Royal et du Dr Blanchard (ancienne rue de la Monnaie)

Nous nous arrêtons devant la Médiathèque, ancien Hôtel Espérandieu aux belles voûtes du 14e s., devenu Maison de la Providence, École des frères des écoles chrétiennes puis Fabrique de chapeaux de feutre…École maternelle, MJC et Croix rouge.

L’impasse qui la jouxte abritait l’importante corporation des débassaïres (faiseurs de bas de soie).

L’Hôtel de Rosier

est la superbe maison d’un des architectes responsables de la restauration de la ville. Elle comporte une pièce ornée de sculptures et de peintures du 18e s. Ainsi qu’une porte biaise chargée de symboles maçonniques (où hélas nous n’avons pas pu entrer) et qui se trouve tout à fait à côté du Jardin médiéval.

L’Hôtel des Consuls

Nous pénétrons dans la cour pavée de pierres d’Arpaillargues, belles pierres dures posées en barrettes (sur champ pour les spécialistes) en passant la belle grille en fer forgée. Cette maison fut l’Hôtel des Consuls jusqu’au 18e s. Elle est accolée à l’ancienne église Saint-Laurent transformée en arsenal et détruite, ainsi que des maisons voisines, par l’explosion d’un dépôt de poudre lors d’un orage. Devenue Maison du diocèse civil, Hôtel des impôts, puis maison privée, elle a accueilli le Festival Uzès danse et de multiples expositions. Elle possédait un joli jardin de broderie de buis et un salon couvert de fines boiseries. Elle appartient aujourd’hui à une Maison d’Editions.

L’Hôtel d’Amoreux

Dans l’Hotel d’Amoreux

Une magnifique porte moulurée du 18e s’ouvre sur une petite cour intérieure où nous pénétrons pour aller admirer le grand escalier aux balustres en poires biaises, aux murs couverts de tableaux. Son propriétaire, Christian Feller bien connu pour être à l’initiative des conférences du temple et des Éditions de la Nouvelle Cigale nous reçoit pour nous parler de Jean-Jacques Brousson, ancien propriétaire du lieu et ancien secrétaire d’Anatole France, dont il conserve une grande cheminée rococo. Brousson est l’auteur d' »Anatole France en pantoufles » qui fut un best-seller de l’époque ce qui lui a permis d’acheter cette belle demeure.

Rue Entre les Tours

En passant par la rue Gaston Chauvet, célèbre auteur d' »Uzès son histoire ses monuments » (que je vous recommande) nous atteignons l’Hôtel du vieux logis où nous entrons pour contempler la cour intérieure à la belle façade Renaissance avec sa tour à escalier en vis.

Poursuivant la rue Entre les tours par la rue de l’Épée nous passons sous un arceau (seul témoignage de ces arceaux ou pièce sur rue) pour atteindre l’Hôtel de Flaux où habitait notre guide et empruntons le passage Gourbeyre qui longe la maison de Moyse Charas, célèbre apothicaire, auteur de la fameuse Thériaque.

La Place aux Herbes

La Maison Alméras

La Maison Alméras a la particularité de posséder dans le pilier d’angle (comme dans la maison en face), une petite porte 17e aux panneaux en pointes de diamants. Derrière la porte un escalier en vis creuse (du bas on aperçoit le jour) est prolongé par une jolie tourelle sur doubles trompes surmontée d’une coupolette. Elle possède aussi une fenêtre encadrée d’une frise et présente deux curieuses sculptures d’homme de profils.

L’Hôtel de la Rochette

Le froid et la pluie s’intensifiant nous nous sommes abrités sous le porche de l’Hôtel de la Rochette où notre guide a évoqué les bâtiments détruits en 1890 pour élargir la place, ainsi que les bâtiments qui s’étaient écroulés en 1960, ce qui a déclenché la restauration du centre ancien grâce à la Loi Malraux de 1962. Il a également évoqué le célèbre film tourné à Uzès en 1989 sur cette même Place aux Herbes : Cyrano de Bergerac de JP Rappeneau, dont justement l’Hôtel de la Rochette, belle demeure, a servi de décor. La place était méconnaissable, le marché du samedi était détrôné et remplacé par un marché du 17e.

Frigorifiés, la plupart des zébriniens se sont esquivés après avoir bien remercié notre guide sympathique, intarissable et stoïque sous son chapeau de feutre. Un bon chocolat chaud a requinqué les derniers zébriniens.

Cette découverte personnelle d’Uzès en entrainera peut-être d’autres, tant le sujet est vaste. A suivre.

Pour aller plus loin

  • Uzès et l’Uzège 20 siècles d’histoire : Collectif .- Ed. Études & Communication
  • Abécédaire d’Uzès : M. Peyroche d’Arnaud.- Ed. Alcide
  • Les belles demeures familiales d’Uzès : J-C Galand – M. Olmière .- Ed. Les Presses du Languedoc
  • Uzès son histoire ses monuments en parcourant ses venelles et ses places : G. Chauvet.- Atelier H. Peladan
  • Uzès : M-L Laporte – J. Roux.- Ed. Equinoxe
  • Secteur sauvegardé d’Uzès : N. Depaire.- Ed. Equinoxe
  • et bien d’autres

Quelques photos de la visite

 

 

 

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