11 mars 2020 – Visite de Vézénobres

Le village de Vézénobres

Vézénobres

Les capitelles de Vézénobres (le bois Rascalas) et le circuit de l’eau. Visite du centre ancien de Vézénobres. Visite guidée par Michel Wienin, scientifique et spéléologue chevronné,  ancien président de la Société Cévenole de Spéléologie et Préhistoire..

Rendez-vous : 10h  au parking de la table d’orientation de Vézénobres ou 9h15 au parking de la salle polyvalente pour covoiturage.

Quelques mots sur la sortie:
La visite a été proposée par Annie et Philippe avec l’aide de Marcel Watier pour le choix du guide. Un pique-nique est prévu.

Ça c'est bien passé

Le site

Sous un ciel radieux (bien différent de celui de Nîmes lors de la précédente sortie !) et une température estivale, un groupe de 17 zébriniens a pris la petite route de Brignon, Cruviers, Ners… pour grimper jusqu’au parking de la table d’orientation de Vézénobres où ils ont retrouvé Michel Wienin, notre guide du jour.

Michel et les zébiniens dans la montée du fort

Michel Wienin

Il est à la fois géologue, chercheur, enseignant… il a réalisé l’inventaire des sites industriels en Languedoc Roussillon. Il est aussi spéléologue et ami de Marcel Watier, ce qui nous a permis (et nous en remercions Marcel) de l’avoir pour guide. Mais il est aussi un enfant de Vézénobres où il a la chance d’habiter dans sa maison de famille (du 12e s.) qu’il nous a aimablement ouverte. Connaissant bien l’histoire de son village, il a su nous faire comprendre son évolution à partir d’un intéressant point de vue économique et technique.

Table d’orientation

La table d’orientation

Nous avons commencé par nous situer à partir de la table d’orientation qui se trouve au sommet du village à l’emplacement de l’oppidum et du fort. Michel nous a désigné tous les sommets que nous pouvions apercevoir. D’un côté les Cévennes avec le Mont Lozère, l’Aigoual…, le Pic St Loup, pour les plus connus, de l’autre côté la garrigue avec le Mont Bouquet (dont nous avons l’habitude de voir la face opposée)… et même le Ventoux, mais aussi le Gardon … le tout dans une visibilité exceptionnelle.

Quelques fragments de mur d’enceinte du fort qui succède à l’oppidum gallo-romain  demeurent encore en place, surmontés pendant la dernière guerre par une tour de guet dont il ne reste que l’encrage des piliers.

Le village médiéval

Vézénobres est un superbe village perché qui a le label Village de caractère et compte 1800 habitants. Étape sur le chemin de Regordane il a connu une grande prospérité au Moyen Age.

Nous entrons dans le village par la porte de l’Auro (vent du nord), une des cinq portes de l’enceinte. Seules quelques belles pierres à bossage témoignent de son existence. Nous descendons la rue du Haut plan, celle de la Montée du fort pour atteindre la Grand rue. Des rues caladées, bordées d’anciennes maisons.

Maison de famille de Michel Wienin

Maison à calabert

Nous entrons dans celle de notre guide pour y découvrir une vaste pièce voutée en berceaux croisés qui parait traversante tant elle est éclairée par la terrasse couverte voutée en berceau, appelée autrefois calabert et destinée au séchage des figues. Notre hôte nous explique que toutes les maisons de cette rue possédaient au 17e siècle ce genre de terrasse, ce qui participe aujourd’hui à la beauté du village, offrant à la vue ces alignements de grandes voûtes. Jadis on y installait sur de grandes piques de bois, des colliers de figues (séparées par des nœuds) que l’on laissait sécher quelques mois pour obtenir ces fameuses figues sèches prêtes à fournir des fruits en hiver, vendues à la foire de la St André en automne. De la terrasse la vue est magnifique sur les collines, les toits du village, le Gardon et le verger-conservatoire des figuiers où 1000 figuiers de 100 variétés différentes proviennent du Conservatoire botanique National de Porqueroles. La grande pièce servait d’échoppe au Moyen Age, ouvrant par une large porte sur la rue, une plus petite porte permettait d’accéder par un escalier aux chambres. Un autre escalier descendait sur trois niveaux où étaient abrités les bêtes, les marchandises…

Les andrones

En remontant la Grand rue, nous passons devant d’étroites ruelles ou escaliers qui permettaient d’atteindre la rue en dessous, sans avoir besoin de parcourir ces longues rues parallèles.

Les doubles portes

Les doubles portes

Nous passons devant des maisons aux curieux doubles encadrements de portes. A la fin du 18e s., pour échapper à l‘impôt sur les portes et fenêtres, de nombreuses portes cochères ont été réduites offrant cette curieuse architecture parfois doublée. De longs claveaux faits d’un calcaire blanc et dur du pays constituent ces grands arceaux du Moyen Age où s’incorporent des encadrements de porte plus tardifs.

Certaines fenêtres au dernier étage des maisons sont surmontées de la carrelle (carréla) ou poulie pour monter la paille ou le foin et plusieurs maisons possèdent une corniche décorative.

Maison romane

Rue des maisons romanes

Nous continuons cette passionnante lecture de façades pour atteindre la rue des maisons romanes. Exceptionnelle rue bordée de magnifiques façades de rares maisons civiles à étage du 12 et 13e s. Une fine corniche de losanges posés sur la pointe décore plusieurs maisons créant un bel ensemble. Partout règne le calcaire blanc et dur comme le marbre. Quelques pierres en réemploi sont incorporées à la façade comme ce chapiteau avec une chimère (au dessus de la fenêtre). Ces riches demeures étaient habitées par des artisans et des marchands, certains désignés comme Génois ou Pisans, car le village se trouvait sur le chemin de Regordane, importante voie de commerce médiéval.

Château de Thoiras

Le château de Thoiras

Nous poursuivons en passant près de la porte Viterne et nous dirigeons vers le château de la famille Girard. La plus belle demeure du village avec ses mâchicoulis et ses fenêtres à meneaux, vendue au 17e s. à la commune, il abrite la Mairie, l’Office de Tourisme et la Maison de la figue.Nous pénétrons dans l’ancienne cour du château devenue rue du porche, ruelle voûtée par une verrière du 20e siècle en passant sous une porte de défense et nous arrivons à la place de la Mairie.

Place de la Mairie

Située entre la Grand’rue et la rue de l’horloge, voici la plus belle place du village où se trouve bien sûr la Mairie à la porte modifiée, mais aussi les cafés et restaurants, un puits-citerne et une fontaine au curieux visage aux yeux multiples. Surmontant le toit de la Mairie, nous apercevons une jolie petite tourelle dite « cheminée sarrazine » qui pourrait être une ancienne cheminée ou une lanterne des morts. Une belle demeure présente une porte et des fenêtres trilobées.

Porte de Sabran

Porte de Sabran

Nous descendons par la rue de l’horloge vers la porte de Sabran (nom d’une famille importante du village). C’est l’unique porte du 13e siècle conservée, elle fut surmontée d’une tour de l’horloge au 19e siècle.

Devenue une nécessité sociale, l’horloge apparait avec le salariat et les manufactures. Le cadran indiquait les 24 heures et à minuit sonnait deux fois 24 heures, pic et repic. Les 48 coups sont devenus vite insupportables et l’horloge fut remplacée par une plus classique et plus discrète.

A proximité, contre l’ancien rempart se trouve un grand bassin-citerne qui contenait l’eau de la Mayre que nous verrons cette après midi. Notre guide se souvient qu’enfant il venait y chercher de l’eau quand la citerne du haut était à sec. Le bassin, lui, ne l’était jamais.

Le château de Montanègre

Nous retournons vers le haut du village en passant près de la porte Bourgoule (du bourg) et près du château de Montanègre ou Fay Péraut du 12e, 14e siècle, quasiment détruit lors des guerres de Rohan (1628). Le village presque entièrement protestant a souffert de ces guerres. Sont détruits l’enceinte et le château dont il ne reste presque, à dessein et pour l’exemple, qu’un haut mur superbement rectiligne coiffé d’une colonie de corneilles.

Pique-nique

Nous retournons vers le parking sur le chemin de Pateférine où à l’ombre de petits chênes verts, nous nous restaurons confortablement installés sur les tables de pique-nique au bord du chemin qui conduit vers les capitelles et les sources.

Sur le chemin des capitelles

Chemin des capitelles

Le circuit du bois Rascalas est celui qui a motivé notre sortie. Il figure dans le livre du Collectif des Garrigues : L’art de la pierre sèche en Garrigue parmi les 20 balades sur les sentiers du Gard et de l’Hérault, comme notre sentier des Conques.

Le chemin circule entre des murs de pierre sèche, parfois se transforme en chemin clapier et longe des enclos plantés d’oliviers.

Culture de l’olivier

La culture de l’olivier est toujours présente à Vézénobres, elle fût très importante après celle de la figue au 17 e, remplacée par celle du mûriers avec la sériciculture, puis par celle de la vigne dans les terres plus riches et de l’olivier dans les terres plus pauvres. C’était, nous dit Michel, une culture industrielle, non pas seulement pour l’alimentation (pour garnir nos salades) mais pour l’industrie textile et entre autre de la laine. Les fils de laine étaient enduits d’huile d’olive pour faciliter le tissage, les tissus obtenus étaient ensuite nettoyés à la terre de Sommières puis foulés (au moulin à foulon) pour les épaissir et les rendre plus résistants. Elle était aussi utilisée dans les savonneries.

Capitelles et tombeaux

Nous apercevons la première capitelle mais aussi un curieux maset dans le sous bois, juste derrière la cabane. Ce n’est pas un maset mais un tombeau réalisé au 19e siècle (les briques utilisées en témoignent) pour une famille protestante. Plusieurs tombeaux semblables se trouvent dans les bois ou sur les murs et clapas, ils datent d’un temps où les protestants n’avaient pas le droit d’être enterrés dans les cimetières catholiques et devaient l’être, comme en Cévennes, dans le champ près de leur mas ou dans les caves.

Certaines capitelles observées ressemblent aux nôtres, mais la plupart sont plutôt du style « carrade », avec les portes excentrées et constituées de pierres plates et régulières. S’ensuivit une discussion de spécialistes sur la construction de ces fameuses cabanes. Michel, à l’encontre des opinions les plus répandues, nous parle de construction en anneaux et non de voûte à encorbellement… nous nous garderons bien de trancher ce dilemme !

Source de la Mayre

Les sources

Nous continuons notre chemin vers les sources. D’abord la Mayre, source mère, abritée par un petit édifice voûté du 19 e siècle, fermé par une porte en fer. Il est le point de départ d’une longue canalisation en terre cuite réalisée par la commune et le Comte de Bernis-Calvière (propriétaire de la source) pour fournir en eau (partagée à parts égales) le village et le château. L’eau  canalisée se divise en deux. Une canalisation se poursuit jusqu’au bassin du Payre (le père) réservoir de 600 m3 pour desservir le château qui se trouve à 1 km, jalonnée de regards voûtés (permettant le nettoyage). L’autre canalisation part en direction du village pour alimenter les deux grands bassins de la place de la Mairie et celui près de la tour de l’horloge.

Le sentier se poursuit jusqu’à la source captée, autre source abritée par un édifice semblable à celui de la Mayre contenant une eau claire.

Chemin de Regordane

La balade se poursuit dans un chemin caillouteux comme le lit d’un ruisseau où nous admirons un vieil arbousier torsadé. Nous atteignons la route de Deaux en empruntant encore une variante du chemin de  Regordane révélant, dans la pierre, quelques anciennes ornières. Nous décidons ensuite d’écourter la longue boucle prévue par notre guide qui tenait à nous faire découvrir une grande muraille à Martignargues. Il fait vraiment trop chaud et les zébriniens sont déjà bien fatigués.

Château de Calvière

Le château de Calvière

La remontée vers le village est un peu lente. Nous faisons halte pour admirer le château de Calvière, ce petit Versailles baroque crée en 1745 par l’architecte G. Rollin pour le Marquis de Calvière au milieu d’un grand jardin de 17 hectares qui nécessitait beaucoup d’eau, entre autre pour remplir de somptueux bassins ! Toujours la propriété de la famille Calvière et Bernis, il ne se visite pas ! Nous nous glissons dans une partie de l’ancien jardin où Michel avait l’habitude de jouer enfant, pour observer les deux bessous (jumeaux), les deux derniers bassins jumeaux.

Nous atteignons enfin le haut du village où nous attendent bien à l’ombre le deuxième groupe de zébriniens qui avait prudemment rebroussé chemin à la Mayre. Tous fatigués mais contents, nous avons remercié chaleureusement notre guide après avoir tout de même rejoint la fameuse muraille en voiture. Etonnant haut et large mur protégeant simplement une vigne : mystère !

Cette randonnée rendue sportive par la chaleur mais instructive, dans ce village chargé d’histoire, au patrimoine riche entre autres de pierre sèche, et qui plus est, accompagnée d’un guide exceptionnel, correspond tout à fait à l’esprit des visites appréciées par les zébriniens.

 

Quelques photos de la visite


 

 

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