Découverte de l’histoire du jardin ainsi que de ses bâtiments : Tour du roi, salle de garde, tour de l’horloge… Visite organisée et accompagnée de Gilles président de l’Association In situ du Jardin médiéval et membre de la Zébrine. Visite historique guidée par Gilles et visite botanique guidée par Charlotte.
RV : 10 h au jardin Médiéval
Après la Camargue et la Drôme, nous voilà de retour à Uzès au centre de la ville, dans le Jardin Médiéval. Même si certains connaissaient déjà le lieu, peu connaissaient son histoire. 22 zébriniens ont suivi les présentations historique et botanique assurées par l’Association In Situ, heureuse bénéficiaire de ce petit paradis au cœur d’Uzès.
Nos guides
Partie historique : Gilles, membre de la Zébrine et nouveau président de l’association in Situ, nous a proposé cette visite. Professeur d’histoire, il a été séduit et s’est passionné pour ce jardin si historique.
Partie botanique : Charlotte, elle, passionnée et fine connaisseuse des plantes, œuvre dans le jardin depuis pas mal d’années.
L’Association In Situ
Crée en 1995, comme le jardin, sous l’impulsion de l’Office de la Culture, elle gère et entretient ces lieux qui sont municipaux, afin de mettre en valeur ce riche patrimoine. De nombreux uzétiens se sont succédés bénévolement pour la faire vivre, entre autres Nicole Beaumont, Charles Olmière et Christian de Beaupuy, ont géré l’association et employé un personnel passionné et compétent comme Dominique, depuis peu à la retraite, Sylvian, Charlotte, Florence et bien d’autres.
Les visites guidées
Aux pieds de la tour du Roi, Gilles évoque le castrum d’Elzéar, vassal du Comte de Toulouse et premier Seigneur d’Uzès, à la charnière du 11e et 12e siècle. Ce castrum, bien situé sur la partie haute de la ville, à distance de l’Évêché, était plus vaste que le jardin actuel car il englobait le Duché.
Pour faciliter la visite, le groupe des zébriniens est scindé en deux.
Visite historique
Au cœur du jardin, dans la deuxième cours, Gilles nous a présenté les deux tours jumelles rectangulaires, celle du Duché et celle de l’Évêque. Nous avons aussi remarqué les deux entrées bien séparées : celle par où nous sommes arrivés et celle que recouvre une peinture murale. Les châteaux d’Uzès résultent de partages successoraux, essentiellement transmis par les femmes et là, je laisse la parole à notre guide, tant cette histoire est complexe. (texte des notes qu’il a eu la gentillesse de nous transmettre) .
La chapelle
Au fond de la cour de l’Évêque, nous passons la porte d’une grande salle voutée appelée « la chapelle », dont les murs sont couverts de graffitis. Son plafond évoque en effet celui d’une chapelle qui ne l’est que depuis 1826. Ce fut un lieu carcéral pendant cinq siècles jusqu’en 1789. Parmi les graffitis gravés par les prisonniers, on peut remarquer une frise de caractères gothiques révélant les mots occitans Desperensa et Delivrensa (nul besoin d’avoir fait de l’ancien occitan pour comprendre et compatir). Il y a de nombreux » Arbres de vie » ou branches de gui, des monogrammes IHS Maria et surtout, comme le précise Sylvian, la mention de trois frères Longuet de Vers et des Baux, cordonniers et laboureurs qui y ont passé cinq mois, en 1632, pour avoir omis de payer une taxe : » la réve « , une taxe royale, dont aucun zébrinien connaissait l’existence. Tous les murs clament leur innocence et leur désespoir !
La salle Raynon
Au fond de la chapelle nous entrons dans une grande salle qui est le rez-de-chaussée de la tour de l’Évêque. Son porche d’entrée se trouve rue Entre les tours. En son centre, une curieuse trappe est un-cul-de-basse-fosse. Cette salle dite Raynon abrite une exposition sur la ville d’Uzès.
Le premier étage de la tour de l’Évêque
Nous empruntons à nouveau une » vis de Saint-Gilles » (cf la visite de l’Abbatiale de Saint-Gilles le mois dernier) pour atteindre la salle du premier étage. Là aussi, de nombreux graffitis nous attendent : des Christs orants, des croix de Malte dites croix huguenotes à quatre lobes et huit pointes, les huit béatitudes, nous apprend Gilles… Nous distinguons quatre grands graffitis, représentant un chevalier portant lance et trois soldats, tous tournés vers la porte d’entrée comme la défendant. Ils portent l’équipement militaire du 14e siècle. Ces gravures dans la belle pierre d’Uzès auraient peut-être été réalisées par des Tuchins ou par des soldats de métier.
La salle des gardes ou Aula
Traversant le jardin, nous passons dans la première cour et entrons dans l’Aula, la résidence seigneuriale composée d’une salle basse avec croisées d’ogives (dite salle des gardes) et d’une salle haute voûtée. L’Aula est proche de la Tour du Roi, tour carrée où on peut grimper (par un escalier en vis ) pour atteindre un panorama magnifique sur la ville. Ce sera l’occasion d’une visite supplémentaire (gratuite pour ceux qui ont adhéré à l’association !) car l’heure prévue pour la visite historique est presque écoulée. La tour est dotée de mâchicoulis et de pierres de bossages. Le roi Louis XIII venu soumettre les villes protestantes (places de sûreté) y résida quatre jours en 1629 : » J’y dormirai car j’y suis chez moi » déclara-t’il !
En bref, comme l’indique le dépliant du jardin, au XVe siècle, les trois tours d’Uzès : tour Bermonde (Duché), tour de l’Évêque et tour du Roi (dans l’enceinte du Jardin médiéval) symboliseront les trois pouvoirs rivaux jusqu’à la Révolution, où tout devient biens nationaux.
La maison d’arrêt
Prolongement du rôle carcéral du lieu, une maison d’arrêt est décrétée en1795-1820. Gilles a bien étudié ce thème.
Une longue rangée de 13 cellules sont construites. Il en reste deux pour témoigner.
Au 20e siècle, les cellules sont devenues des logements pour 200 espagnols réfugiés lors de la » Retirada « . Une exposition en a témoigné ainsi qu’un graffiti conservé sur un mur du jardin : » ESPANA ».
La municipalité a racheté les différents bâtiments en 1941.
» Un moment oubliés, ces lieux chargés d’histoire trouvent une nouvelle vie grâce à la création d’un jardin médiéval ouvert au public « .
Visite botanique
Il était l’heure de changer de groupe et nous suivîmes Charlotte dans ce jardin luxuriant dont l’aménagement s’inspire des jardins clos de la fin du Moyen Age. 450 variétés de plantes y cohabitent et illustrent les multiples usages que l’on faisait des plantes au Moyen Age.
Nous commençons par admirer près du vieux puits, jadis à l’eau abondante, un massif de Câprier dont les bourgeons étaient prêts à être cueillis avant la floraison. Nous admirons ensuite la composition murale de l’herbularium, reproduit en carreaux de céramique vernissée.
L’Herbularium
C’est un jardin des plantes médicinales ou simples, un jardin clos de monastère. Il contenait des plantes de première urgence, les autres simples étant récoltées dans la nature.
Ce jardin est composé de parterres délimités par des plessis d’osier ou de noisetier réalisés par les jardiniers. De nombreuses étiquettes nomment les différentes plantes et leurs vertus. C’est ainsi que Charlotte nous présente les plantes émollientes, adoucissantes (des voies respiratoires) : la Guimauve, la Mauve, la Buglose d’Italie… ; les antitussives comme la Violette, le Tussilage ; les fébrifuges comme les feuilles d’Olivier, le Chardon Béni ; les sudorifiques : Bourrache, Pulmonaires ; les vulnéraires et cicatrisantes comme l’Ortie, antihémorragique, la Consoude, la Renoué bisforte ; les digestives-amères comme l’Absinthe (vermifuge), la Tanaisie, la Sauge, les baies de Cade ou Genévrier oxycèdre tout comme celles plus petites du Genévrier commun. Notre guide nous explique comme il est facile de les différencier : les feuilles présentent un ou deux traits blancs, deux pour le cade (K2). A ne pas confondre avec le Genévrier de Phénicie aux boules rouges toxiques. Toutes les baies de Genévrier sont insecticides comme l’Absinthe et la Tanaisie.
Les roses
Le jardin présente de belles roses souvent parfumées aux noms poétiques dont celles de la Rosa Gallica, rosier ancien connu au Moyen Age, rapporté par les Croisés ou les Arabes pour ses vertus ornementales. Il est à l’origine de la plupart des rosiers d’aujourd’hui. Sa fleur est simple comme celles des Églantiers. Le Rosier de Provin est lui, cultivé pour son parfum. On y a même retrouvé la rose Gil…
Plantes de la première cour
La Réglisse
Nous dirigeant vers la salle des gardes, nous avons observé les petites feuilles de la Réglisse, tonique et cardiaque, qui a une valeur historique à Uzès et dans la région. L’Usine Zan (aujourd’hui Haribo) à Pont-des-charrettes a fourni les fameux bouts de Zan ainsi que les bâtons de réglisse à de nombreux vieux uzétiens, tout comme les usines d’Avignon de Montpellier ou de Moussac. La Réglisse n’y est pas cultivée, ses racines viennent d’Espagne ou d’Italie ou même de Chine.
Quelques arbres du jardin
Le Grenadier est connu depuis l’antiquité : il est symbole d’amour et de fécondité avec ses gros fruits plein de graines rouges. Ses racines sont vermifuges et sa peau contient une substance astringente utilisée en tannerie pour assurer l’étanchéité des peaux.
Le Mûrier blanc aux feuilles polymorphes et aux fruits blancs fut planté, comme le Mûrier noir (aux fruits noirs) en bord de champ pour cette petite industrie de complément qui connu un grand développement : la sériciculture. Les feuilles ont nourri des milliers de magnans (vers à soie).
Ses fruits peuvent être utilisés en confitures mais il ne faut pas le confondre avec le Mûrier à papier aux feuilles veloutées et découpées.
Le carré des céréales
Il présente les différentes variétés de Blé, le Seigle, l’Avoine, l’Epautre. A noter que le Petit Epautre est particulièrement adapté aux terres arides, important pour notre futur en manque d’eau !
Les plantes messicoles
Adventices des moissons, elles sont en voie de disparition à cause des insecticides. La Nielle des blés est toxique, mais beaucoup sont médicinales : le Chardon Béni, le Coquelicot, la Nigelle de Damas, la Renoncule, l’Adonis (toxique), les Pieds d’alouettes…
Plantes de la deuxième cour
Le jardin potager
Le long du mur de clôture se trouvent les alimentaires de cueillette.
La grande Férule, dont on peut consommer les jeunes pousses comme celles du Fragon et bien sûr des Asperges. Elles le furent en période de disette, comme l’Arum d’Italie, toxique dont les bulbes cuits en plusieurs eaux sont comestibles, tout comme les Asphodèles qui ne sont pas toxiques mais qui ne sont pas très bonnes, plutôt utilisées pour en faire de la colle.
Les plantes tinctoriales
Le Pastel des teinturiers aux fleurs jaunes. Les boules de feuilles fermentées étaient appelées « coque », d’où l’expression Pays de Cocagne (où les cultivateurs faisaient fortunes). Il fut concurrencé par l’Indigo dont on importait la fécule à la fin du Moyen Age, pour obtenir de beaux bleus.
La Garance des teinturiers qui donne un beau rouge tout comme sa cousine sauvage, la Garance voyageuse (rouge plus pâle).
Le Réséda des teinturiers cultivé pour sa belle couleur jaune.
La Lambourde utilisée pour teindre les cheveux en jaune ! ?
Les plantes textiles
Le Lin cultivé, le Lin sauvage ou le Lin de Narbonne aux jolies fleurs bleues donnent le tissu de lin si apprécié aujourd’hui.
Le chanvre utilisé pour les cordages et les toiles ; les Orties dont la Ramie qui viennent d’Inde ; le Genet d’Espagne…
Plantes utilitaires
Le Petit Houx ou hérisson de cheminée ; la Saponaire ou Herbe à savon ; le Cornouiller sanguin qui fleurit jaune aux bords des routes, utilisé en vannerie et dont les fruits produisent de l’huile ; les Mûres ; le Pariétaire que personne n’aime, peut-être parce qu’il est allergisant, est pourtant diurétique et soigne l’arthrose. Ses feuilles froissées remplacent les éponges pour nettoyer les ustensiles de cuisine… et tant et tant d’autres.
Toutes les plantes ont de multiples vertus, ce sont des trésors oubliés à notre portée.
La visite s’est terminée autour d’un apéritif composé de tisane de Réglisse et de Citronnelle concoctée par les petites mains du Jardin et de Pineau des Charentes apporté par Gilles et Martine.
On pouvait aller découvrir les deux expositions ou grimper à la tour du Roi, mais aussi, à n’en pas douter, revenir plus tard dans ce lieu magique, ce jardin « extraordinaire ».
Nos deux visites furent accompagnées par les cris des Martinets et les chants des oiseaux, signe de l’importance de cet oasis en pleine ville.
Pour aller plus loin
Quelques photos de la visite
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