6 mars à 9h 30 : Le Parc ornithologique du Pont de Gau est le site idéal pour découvrir, de nombreuses espèces d’oiseaux, dont des centaines de flamants roses, dans leur milieu naturel. Des sentiers serpentent à travers étangs, marais, pelouses, roubines, roselières et sansouïres à la découverte de la nature de Camargue. La visite est précédée par une visite du Musée de la Camargue le matin.
RV : 9h15 pour covoiturage au parking de la salle polyvalente ; 10 h au Musée de la Camargue ; 12h30 au restaurant Le flamant rose ; 14h30 au Parc ornithologique du Pont de Gau
Point de neige dès le réveil comme le lundi précédent (nous avons bien fait de reporter notre visite) mais un beau ciel bleu de début mars pour aller découvrir la Camargue. Seize Zébriniens ont donc pris le chemin du sud pour aller sur l’île de Camargue car il s’agit bien d’une île, entre les deux bras du Rhône et la mer.
La Camargue
L’île de Camargue entre le Petit et le Grand Rhône et la Méditerranée possède un environnement exceptionnel né de la rencontre des eaux douces avec les eaux salées et des activités humaines. Issu de l’accumulation au fil du temps des alluvions sableux et caillouteux de la Durance puis du Rhône à leurs embouchures dans la mer Méditerranée, le delta est constitué de terres propres à la culture au nord et de terres salées réservées à l’élevage au sud. Au milieu des terres, les étangs, dont le plus grand, le Vacarès, constituent une zone humide très importante par la richesse biologique de ses écosystèmes. Le delta s’inscrit entre les villes d’Arles, des Saintes-Maries-de-la-mer et Port-Saint-Louis-du-Rhône, c’est la grande Camargue. La petite Camargue (gardoise), elle, s’étend jusqu’à Aigues-Mortes et le Grau-du-Roi avec l’étang de Scamandre.
Notre balade va nous conduire du Musée de la Camargue au Parc ornithologique en passant par Albaron.
Le Musée de la Camargue
En plein cœur de la Camargue, le musée fut crée en 1978 par le Parc Naturel Régional de Camargue qui a pour vocation de protéger et faire vivre ce patrimoine naturel, culturel et humain. C’est un musée de société qui nous raconte la Camargue d’autrefois (plutôt au 19e siècle) à aujourd’hui. Il est situé dans une ancienne et très grande bergerie traditionnelle, construite comme les cabanes de gardians en bois, terre et autrefois sagnes (roseaux). Les cabanes sont orientées nord-sud avec la partie au nord arrondie pour se protéger du Mistral, surmontée d’une croix penchée. Cette bergerie dépendait du Mas du Pont de Rousty. C’est un grand mas-type qui daterait du 15e siècle, jadis possession de la famille aristocratique des Quiqueran et qui portait alors le nom de Beaujeu. Le mas abrite aujourd’hui le siège du Parc Naturel Régional de Camargue.
Le guide
Guillaume, le jeune guide sympathique et féru de traditions, connait bien l’histoire et la société camarguaise.
Les collections
Dès l’entrée dans la bergerie-musée, le guide nous a fait parcourir l’ensemble du territoire du delta sur une grande carte au sol. Des maquettes du mas et de la bergerie nous ont permis de comprendre le fonctionnement agricole traditionnel d’une ferme camarguaise : le mas.
Sitôt entrés dans la 2e et très longue salle, qui pouvait contenir jadis 1500 moutons mérinos d’Arles (mais non nous ne sommes pas des moutons !), une maquette de la grande table de ferme occupée par les travailleurs du mas pour le repas, nous a quelque peu surpris, voire plus. Le placement y était très hiérarchisé. La table est présidée par le baïle (le régisseur), entouré du maître laboureur, du baïle pastre et des pastres (bergers), du baïle gardians et des gardians jusqu’aux rafis (ouvriers agricoles). La femme se tient à l’écart pour servir. C’est la tante (qui gère les repas), elle mangera ensuite avec les autres femmes du mas !!
Les costumes
La première vitrine présente les costumes féminin et masculin de tous les jours. Veste en velours, chemise en pilou, bottes cuissardes sur le pantalon en peau de taupe, sabots et seden en bandoulière pour l’homme (en position de cavalier). Jupe et tablier, châle, petite coiffe blanche et sabots pour la femme, c’est le costume de la tante, la gouvernante du mas. Elle tient et est entourée de plats et cruches en terre semblables à ceux de Saint-Quentin, tout à côté trône une belle panetière.
Dans la vitrine suivante, le troisième personnage important : le pastre (le berger). Son costume est étonnant : une grande limousine (cape) recouvre l’ensemble des vêtements, des sonnailles y sont accrochées. Il porte des sabots et une grande sacoche. A sa droite, une collection de marques pour distinguer les moutons lors de la transhumance. Ces marques en fer étaient peintes sur le dos du mouton après la tonte. Notre guide nous fait remarquer que des essais de peinture sont visibles sur des grosses poutres basses de la charpente. La chasse et la pêche sont aussi évoqués avec de curieux souliers à clous (a clavèu) pour pêcher le poisson plat enfoui dans le sable, ainsi que des nasses en osier et des filets.
Tous ces costumes, comme tous les objets présentés sont authentiques, donnés par la population pour constituer les collections du musée, tout comme pour le Museum Arlaten d’Arles.
Chevaux et taureaux
Sur le mur faisant face aux vitrines sont présentés de nombreux objets curieux liés à l’élevage des taureaux et des chevaux qui ont bien supplanté les moutons.
La carrello (tour) pour réaliser le seden, corde très solide, torsadée, bicolore, fabriquée par les gardians avec le crin des juments. Un tableau représente les chevaux de race camarguaise blancs arnachés du seden.
Des panneaux regroupent les motifs des marques et escoussures des manades servant à reconnaitre, là aussi, les taureaux. Ces marques au fer rouge (et non peintes comme celles des moutons) étaient réalisées au cour de la ferrade par les hommes du mas, l’occasion de se mesurer et de montrer sa force et son adresse. La ferrade était une fête, presque un spectacle.
« Connaissez vous cet objet en bois de saule ? C’est le mourraio qui empéchait le jeune veau de têter leur mère » précise Guillaume. Il attire notre attention sur les tridents, outils indispensables des gardians dont la confrérie date du 16e siècle.
On pouvait voir bien d’autres photographies et objets tous liés à ces animaux indissociables et enfin une belle selle camarguaise qui emboitait bien le cavalier
Les gardians
Ces cavaliers appelés gardians, non seulement gardaient et s’occupaient des taureaux et des chevaux mais, aujourd’hui encore, conduisent les taureaux dans les rues des villages camarguais, languedociens et provençaux. Ils entourent à cheval le groupe de taureaux pour une abrivado (l’aller) ou une bandido (le retour) ou jusqu’aux arènes pour une course camarguaise ou libre. Avez vous déjà assisté à celles de la fête votive d’Uzès ? A Arpaillargues, dans les années 60, des charrettes étaient placées en arc de cercle sur l’aire communale et les jeunes intrépides du village s’amusaient avec les taureaux !
La course camarguaise
Notre guide connaisseur très précis nous a présenté la bouvine et raconté le déroulement de ces courses : dans une arène, on peut voir successivement 6 à 7 taureaux de Camargue et autant de raseteurs (plus pour les courses libres) habillés de blanc, courant et bondissant pour enlever, à l’aide d’un crochet les attributs : la cocarde, les glands et les ficelles placés entre les cornes du taureau (le cocardier). Il faut du courage, de l’habileté et de l’entrainement. Née des jeux organisés au mas, la course s’est codifiée et transformée en véritable spectacle et devient un sport officiel en 1975.
La Nacioun gardiano
Sur le mur suivant sont présentées les traditions toujours vivantes de la Nacioun gardiano, association créée par le marquis Folco de Baroncelli en 1909 pour préserver la culture et la langue provençale, glorifier le costume, les us et les traditions du pays d’Arles et de la Camargue et propager la doctrine félibréenne et l’œuvre de Frédéric Mistral.
Les costumes deviennent ceux que l’on peut voir lors des défilés et des fêtes camarguaises, entre autres l’élection de la reine d’Arles. Les hommes portent le pantalon en peau de taupe (moleskine) marqué d’une fine bande noire, la chemise provençale colorée et la veste en velours noir, cravate, bottes et chapeau. Les femmes portent la jupe en indienne, le tablier, le caraco ou la robe en satin, le cache-cœur, le fichu et la coiffe en ruban ou en nœud de dentelle.
La Reine d’Arles
Véritable ambassadrice de la culture provençale elle doit savoir parler la langue d’Oc, être née à Arles de famille arlésienne, connaître les traditions, savoir se coiffer et revêtir seule le costume… Elle doit représenter la Camargue et la Provence pendant trois ans lors de nombreuse fêtes. C’est un honneur et un véritable travail bénévole !
Biens d’autres panneaux, vitrines et objets présentent les travaux de la terre, la viticulture, la récolte du sel, les installations hydrauliques, le peuplement de la Camargue et le tourisme… et enfin des œuvres contemporaines dédiées aux Saintes Marie de la mer dont l’histoire est évoquée et, entre autres, celle de Sara qui fait l’objet d’une attention particulière avec les œuvres d’un collectif d’artistes comme Lattier, Viallat, Lacroix…
Le Priape
Mais oui, à notre grand étonnement un Priape se trouve à l’entrée de la grande salle, à côté d’une amphore gallo-romaine, dans la partie archéologie. Il trône, portant une guirlande de pampres de vignes et de raisins. De même facture, il pourrait être aussi grand que le nôtre mais il est incomplet. Il date du IIe siècle de notre ère, signe que tout le delta était occupé depuis bien longtemps et pas seulement Arles la romaine.
Nous n’avons bien sûr, pas pu aborder tous les thèmes représentés et je vous invite comme pour tous les musées à y retourner ! Mais tous très contents de notre guide, nous l’avons félicité et remercié. Il a bien su nous montrer que les traditions camarguaises sont encore vivantes. Plusieurs zébriniens ont bien envie d’assister à la fête des gardians du 1er mai. Pourquoi pas !
Albaron
Nous avons quitté le musée pour nous diriger vers le restaurant le Flamant rose dans le village d’Albaron tout près, où la restauratrice aimable et efficace nous a régalés de gardiane de taureaux pour les uns et de rouille pour les autres. Une bonne adresse recommandée par Jean-Pierre et Françoise.
Et maintenant si nous allions voir les oiseaux !
Le Parc ornithologique du Pont de Gau
La Camargue est située dans l’axe de migration des oiseaux du Nord de l’Europe vers l’Afrique. Elle forme un relais vital pour l’avifaune, plus de 150 000 oiseaux y transitent chaque année.
Crée en 1949 par un ornithologue passionné comme un petit zoo, il devient, avec son fils en 1974, un véritable parc ornithologique. En l’agrandissant et en aménageant des chemins, ils ont permis aux visiteurs d’approcher au plus près la faune sauvage et la flore dans son milieu naturel. Il est composé de marais, d’étangs, de roselières, de pelouses, de sansouires et de roubines. Cette diversité favorise la présence de nombreuses espèces d’oiseaux, tant sédentaires que migrateurs. Sept kilomètres de sentiers serpentent dans le parc. Le parc comporte en outre un centre de soin qui a accueilli en 2012 de nombreux flamants roses alors que les étangs étaient gelés. Il s’y effectuent aussi des opérations de baguage des jeunes oiseaux.
La guide
Chloé notre jeune guide, charmante et amusante, est passionnée par les oiseaux depuis son enfance. Non seulement elle les connait très bien mais elle sait aussi les imiter pour mieux nous faire entendre et reconnaitre leurs cris.
Après nous avoir parlé du delta où le Rhône pouvait avoir un temps cinq bras, elle nous a conduit sur le chemin qui longe une allée de très gros Tamaris, un des rares arbres à supporter le sel.
Les oiseaux
Les premiers observés sont les Étourneaux sansonnets (que nous connaissons que trop bien en Uzège) mais dont Chloé a vanté les dons d’imitateur. Elle nous a ensuite précisé que le parc était un conservatoire pour les Moineaux friquets, à ne pas confondre avec nos Moineaux domestiques, puis arrivant au bord de l’eau elle a attiré notre attention sur un groupe de canards. Trois mâles à la tête verte (des Colverts) faisaient leur cour à une femelle au plumage plus discret (marron pour ne pas attirer les prédateurs). La femelle, visiblement lassée a plongé dans l’eau suivie de ses trois soupirants.
Un peu plus loin nous avons observé la colonie de Hérons cendrés très occupés à défendre et à construire leurs nids sur la canopée des arbres au bord de l’eau. Ces grands oiseaux « au long bec emmanché d’un long cou » se nourrissent de reptiles, batraciens, poissons et campagnols. On peut repérer les jeunes mâles portant une branche dans leur bec pour l’offrir à leur femelle qui l’accepte ou la rejette. Certains nids ont quelques petits. Les hérons et leurs nids sont très nombreux. Pour éviter les conflits, des supports de nids ont été placés dans les arbres qui bordent les étangs, quelques Hérons garde-bœufs au plumage plus blanc s’y promenaient ou nous survolaient.
Les parades nuptiales
Nous sommes à la saison de la séduction où chacun cherche l’âme sœur. Ce sont d’ailleurs les parades des Flamants roses qui nous ont conduits dans ce parc sur les conseils d’Édith. C’était une très bonne idée.
De décembre à début mars, infatigables, les flamants se livrent à un ballet incessant pouvant présenter jusqu’à 136 figures. Le cou dressé, comme allongé, la tête altière tournée alternativement de droite à gauche, les ailes déployées et battantes, révélant les couleurs rouges et noires spectaculaires. C’est un spectacle hypnotique que nous aurions pu admirer toute l’après midi. En groupe, les mâles, comme les femelles plus petites, paradent en poussant des cris puissants, plus grave pour le mâle et plus flûté pour la femelle. Chloé les refaisait fort bien ! Elle nous a longuement parlé de leurs comportements.
Les flamants roses
Certains ayant choisi leur partenaire pour l’année promenaient par deux ou se reposaient sur une patte en cachant la tête sous leur aile en formant avec leur cou un joli nœud en colimaçon. Beaucoup fouillaient longuement la vase pour y trouver leur nourriture préférée cette minuscule crevette (à distinguer de nos crevettes roses), l’Artémie et qui contient un pigment, le carotène, qui donne aux flamants leur belle couleur rose. Leurs becs possèdent des fanons (comme les baleines) qui leur permettent de filtrer l’eau. Presque tout est rose chez le flamant : le bec, les pattes, les plumes, sauf l’œil jaune. De temps en temps, ils se maquillent, nous dit Chloé, car ils possèdent une glande sous la queue qui produit une substance dont ils enduisent leurs plumes pour conserver leurs belles couleurs. Les juvéniles n’ont pas cette belle couleur, ils sont plus gris jusqu’à l’âge de 3/4 ans. Les flamants sont nomades, ils changent d’étang très régulièrement et peuvent aussi migrer. Certains observés portaient une bague espagnole et d’autres portugaise nous fait remarquer Chloé. Ils fabriquent leurs nids en terre et en végétaux au bord de l’eau les uns près des autres où la femelle pond un seul œuf couvé alternativement par les deux parents.
Nous avons eu la chance d’observer un accouplement (généralement effectué plus tard en avril) très rapide (8 ») mais spectaculaire par les battements d’ailes.
D’autres oiseaux
Tout en poursuivant le chemin nous avons pu observer un Ibis au bec recourbé et aux belles plumes moirées accompagné de Canards nains, le vol de Mouettes rieuses et de Mouettes mélanocéphales plus blanches, des Poules d’eau au bec rouge, des Foulques, des Aigrettes… car le site héberge de nombreux oiseaux qui y trouvent sécurité et nourriture dans les nombreux étangs et îlots. Il devait y avoir près de 20 000 oiseaux ce jour-là. Les gardes du parc tentent de les dénombrer et l’affichent au début du parcours. Mi-janvier, lorsque nous y sommes allés en repérage, les flamants étaient au nombre de 1852 !
Nous serions bien restés plus longtemps dans le parc, comme ce photographe équipé d’un très grand objectif posté depuis des heures à attendre l’atterrissage d’un héron dans son nid dans l’espoir de la meilleure photo mais nous commencions à être fourbus !
Ce fut une journée bien remplie et très agréable, les deux visites se complétant à merveille !
Pour aller plus loin
- Le Musée de la Camargue : les visites virtuelles
- Les gardians de Camargue et leurs chevaux. In situ journal du patrimoine
- Costumes pour les travaux agricoles. Camargue. Vie paysanne autrefois
- Parc ornithologique du Pont de Gau
- Les oiseaux du Parc Naturel Régional de Camargue
Quelques photos de la visite
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